Fils de Louis Femand Paturau (q.v.) et de Marie Josèphe Marthe de Sornay, né à "Coin de France", Saint-Pierre, le 23 avril 1916. Après ses classes au couvent de Lorette de Saint-Pierre (1923 - 1929) et au Collège Royal de Curepipe (1930 - 1936) il entra au Collège d'Agriculture mais n'y resta que trois mois. Admis à City and Guilds, à Londres, il en sortit, peu avant la déclaration de la guerre, ingénieur mécanicien et aéronautique, avec les honneurs de 1ère Classe. Appelé au service armé, il s'engagea le 11 septembre 1939 au Bataillon de l'Air 9/106 de Bordeaux-Merignac, Ecole de l'air, où il devint Elève Officier de Réserve le 20 avril 1940 et Aspirant le 8 septembre. Décide à rejoindre la France Libre, il gagna Gibraltar, par le Maroc et l'Espagne où il se fit passer pour Américain. Arrivé en Grande Bretagne le 13 avril 1941, il s'engagea dans les Forces Aériennes Françaises Libres le 15 avril avec le grade de sous-lieutenant, cadre navigant. Détaché dans la RAF pour suivre des cours complémentaires et spécialisés de navigation à l'école de l'Ile de Man, à celle de parachutage à Ringway, à celle d'Astro - Navigation à Geneita, Egypte, à l'école Anti-sous-marine à Abu Swcir. Egypte, à celle spécialisée pour bombardier chef de file, à Manby, Lincolnshirc. Affecté au Groupe "Lorraine" 1/20 le 1er octobre 1941 en qualité de navigateur, chef de formation. Il participa aux opérations de Lybie (24 septembre 1941 - 12 février 1942), de Syrie (13 février - 13 août 1942), de Palestine (14 août - 7 octobre 1942) et d'Egypte (8 - 21 octobre 1942), et s'avéra dès ses débuts observateur de grande classe, obtenant sa première citation et la Croix de Guerre avec palme de bronze le 17 mars 1942, pour des coups directs sur un aérodrome ennemi. Après le retour du Groupe Lorraine en Grande Bretagne en octobre 1942 il participa à de nombreuses missions de bombardement de jour sur des objectifs situés en France occupée, parmi lesquelles des opérations en vol rasant dont il devenait un spécialiste : le 3 octobre 1943 il mena l'un de ces raids, des plus audacieux de toute la guerre. Un convoi allemand se déplace du sud vers le nord de la France par le rail. Il s'agit d'enrayer ce mouvement en détruisant la centrale électrique de Chevilly-Larue qui alimente le chemin de fer Paris-Orléans. Le Groupe Lorraine fournit trois "boîtes" de quatre avions. Le Wing Commander, lieutenant-colonel Henri de Rancourt sera dans l’avion de tête avec Paturau qui doit mener avec précision les avions à l'objectif, pour épargner les civils. Paturau décide d'enfiler la vallée de Chevreuse : la ligne de haute tension doit les conduire droit sur la centrale de petites dimensions, 200 mètres de long sur 80 de large. Les bombardiers Douglas-Boston arrivent dessus dans l'ordre prévu et Paturau au lance-bombes place les quatre premières au but Lorsque les douze avions sont passés, sept unités de transformateurs sur dix sont complètement détruites et les trois autres sérieusement endommagées: cet exploit tait l’admiration des experts alliés. Le 29 novembre 1943 il ajoute une seconde palme à sa croix de guerre, et le 6 février 1944, par décision de Sa Majesté George VI, il reçoit la Distinguished Flying Cross : "As leading navigator of his squadron. he h as completed 43 sorties involving 80 flying hours. Despite the most intense opposition ... Lieutenant Paturau bas skilfully navigated his squadron to and from the targets ..." Le 19 et le 23 avril 1944 il mena des attaques contre deux aires de départ de Flying Bombs et les mit hors d'usage en dépit d'un tir de DCA intense. Le 5 mai, sur une gare de triage de Cambrai : bombardement efficace et précis. Le 9 mai, avec une formation de douze avions, il détruisit le hangar à locomotives de la gare de Valenciennes sans démolir une seule maison de la ville. Le 12 mai il atteignit une nouvelle installation de Flying Bombs et le 24 mai un autre objectif violemment défendu par la DCA ennemie. Le 12 juin il réussit une attaque des blindés ennemis malgré un tir très important de la DCA adverse et au cours de laquelle son avion fut dangereusement touché. Capitaine le 25 juin, et muté à l'Etat-major des F.A.F.L. en Grande Bretagne le 1er août 1944. Deux palmes s'ajoutent à sa croix de guerre et le 20 novembre le général de Gaulle signe la citation qui fait de lui un Compagnon de la Libération : "Répondant à l'appel de la France en péril de mort ... vous avez été de ceux qui, au premier rang, lui ont permis de remporter la victoire !" Le 30 décembre il reçoit la Légion d'Honneur à titre militaire : il est devenu une inspiration pour ses camarades français et britanniques. "Navigateur leader d'une science rare ... magnifique officier, aviateur accompli, combattant de premier ordre ... une des figures les plus marquantes de l'Aviation Française en Grande Bretagne." Il reçut une cinquième palme à sa croix de guerre le 16 juin 1945, alors qu'il était Attaché de l'Air adjoint à l'Ambassade de France à Londres (16 avril 1945 - 24 avril 1946). Au moment de sa démobilisation le 13 mai 1946, il totalisait 84 missions de guerre et 500 heures de vol, et avait reçu une blessure "en service aérien commandé" le 22 octobre 1943. Nommé Commandant de réserve, cadre navigant le 20 juin 1946. Revenu à Maurice en 1946, il entra au conseil d'administration des Forges Tardieu où il siégea jusqu'en 1962. Versé dans les officiers des Bases de l'air le 21 juillet 1952. Le 16 décembre 1953 il épousa Irène Marie Claude Lagesse, dont postérité. Membre actif de la Société de Technologie Agricole et Sucrière, il la présida pendant ces années 50. Membre nommé à l'Assemblée Législative le 7 juin 1962, il remplaça André Nairac comme ministre du commerce, de l'industrie, du tourisme et des communications extérieures à partir du 15 octobre. Prit part à la conférence constitutionnelle de Lancaster House, à Londres, en septembre 1965. Il quitta le cabinet de Sir Seewoosagur Ramgoolam (q. v.) le 30 juin 1966 et lors des débats sur le budget, le 22 juillet, il mit les politiciens de carrière en garde contre les solutions faciles : "La première erreur est celle d'avoir cru qu'un simple transfert de revenus d'un secteur de la population à l'autre allait fournir la solution à tous nos problèmes. On n'a pas compris que ce transfert que requiert la justice sociale et la politique dans le sens le plus élevé de ce mot, doit s'opérer non seulement de manière progressive et judicieuse, mais surtout en prenant en considération toutes les conditions nécessaires pour augmenter constamment la productivité globale. Laisser croire au résultat facile sans la dure nécessité du travail constant et acharné, c'est accepter rapidement le nivellement par le bas, la stagnation et bientôt la dégringolade " Il quitta l'Assemblée et la politique le 20 juin 1967. Président de la Chambre d'Agriculture (1967 - 1968) et Managing Director de Ireland Fraser & Co. (1967 - 1971), son livre sur les sous-produits de la canne - By-Products of the Sugar Cane Industry - parut chez Elsevier, en Hollande, en 1969 (et deux autres éditions en 1982 et 1989). Président de !a Mauritius Sugar Industry Research Institute (1970-1975), de la Central Electricity Board (1977-1980), il présida également la Société de l'Histoire de l'île Maurice en 1970 - 1971 et la Société Royale des Arts et des Sciences en 1988. Il avait été admis à l’honorariat de son grade dans l'armée de l'air le 23 avril 1975. Son Histoire Economique de l’Ile Maurice parut en 1988. Membre de la International Society of Sugar Cane Technologists, il prit charge du secrétariat et de la trésorerie du congrès tenu par cette société à Maurice en 1962 et en présida la section "Sous-produits de la Canne" de 1974 à 1989. Enfin il présida surtout le Joint Economic Committee, terrain privilégié de rencontres entre le secteur public et le secteur privé de l'Ile Maurice, de mai 1971 à février 1994, date à laquelle il prit sa retraite. En 1995 il publia une courte étude sur les Agents Secrets Mauriciens en France (1940 - 1945) qui prend, sur plusieurs aspects, l'allure d'un témoignage. A la fin de sa carrière ce Fellow of the Institution of Mechanical Engineers du Royaume Uni et Docteur-ès-Scicnces (Hon. causa) de l'Université de Maurice, était également Grand Officier dans l'Ordre mauricien de l'Etoile et de la Clef (GOSK), et Commandeur dans les Ordres de l'Empire Britannique, National du Mérite et de la Légion d'Honneur. Il mourut à Gentilly, Moka, le 27 juin 1996. Il avait conservé intactes toutes les transcendantes vertus de sa jeunesse d'homme de science et de combattant, et cultivé une en particulier dont il se couvrait comme d'un bouclier : la modestie.
Raymond d'Unienville--------------
Bibl. :
- Biographie et textes de citations communiques par le Bureau central d'Incorporation et d'Archives de l'Armée de l’Air 01.510.
- Livret Matricule d'Officier.
- François Broche - Les Bombardiers de la France Libre - Groupe Lorraine (Paris, 1979).
- Icare, tome 7 Nos 166 et 167.
- L'Express & Le Mauricien du 28 juin 1996.
- Debates of the Legislative Assembly 1962 - 1967.
- J.R. Williams, ed. - Proceedings of the 11th Congress of the I.S.S.C.T. 1962 (Elsevier, 1963).
Icon. :
- Proceedings of the 11th Congress of the I.SS.C. T., 1962 (supra) p. XX.
- L'Express (supra).
- Effigie sur la coupure de Rs 50 (1998).
Dictionnaire de Biographie Mauricienne, 1999, N° 53, pp. 1702 - 1705.